Spiritualité apostolique

Spiritualité apostolique

En 1798, Jeanne-Claude Jacoulet ouvre une petite école dans un quartier de Besançon. L’esprit qui l’anime, nous pouvons le deviner à travers ses écrits : Constitutions, Livrets pour la formation des Sœurs, des enfants, Lettres adressées aux institutrices, aux responsables de communauté, spécialement celles destinées à Mère Gabrielle, sa plus proche collaboratrice. Mère Jacoulet s’y exprime avec beaucoup de spontanéité et l’on est frappé de constater combien la réalité la plus quotidienne est relue à la lumière de la foi.

Sa spiritualité est essentiellement apostolique, unissant, dans une démarche consacrée, vie spirituelle et activité missionnaire.

Cette spiritualité est nourrie par l’expérience personnelle et par les événements : Jeanne-Claude Jacoulet a connu la rude vie de jardinière qui devait gagner son pain par le travail manuel; elle a traversé la période révolutionnaire, participé activement à la résistance religieuse.  Elle a été touchée par le dynamisme missionnaire de prêtres et de laïcs passionnés pour l’Église au point de risquer leur vie pour elle.

Sa spiritualité s’est inspirée de celle de St Ignace de Loyola, le fondateur des Jésuites, mais elle y ajoute sa note personnelle qui caractérise ‘l’esprit Sainte Famille’ et sa sève apostolique.

Remettez tout entre les mains de Dieu
Elles chériront la sainte pauvreté comme leur mère… Elles ne pourront pas garder plus d’argent qu’il n’en faut pour faire les provisions de l’année. Tout le profit qu’elles pourront faire sera employé à recevoir gratis des enfants pauvres. L’union, la charité, le désir de nous rendre utiles pour l‘éducation des jeunes filles, spécialement de celles qui sont pauvres, sont les liens qui nous unissent depuis dix ans. Après quelques années, nous nous sommes appelées  du nom de sœuret ce nom est le seul qui nous reste actuellement.

Les filles qui se consacrent à Dieu pour le servir dans la Société de la Sainte-Famille doivent regarder la Maison de Nazareth, où existait la Sainte Famille dont elles ont l’honneur de porter le Nom, comme l’école des vertus qu’elles doivent pratiquer…

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En 1817, Mère Marie-Joseph part pour Amiens, sur un appel du Père Sellier. Absorbée par les préparatifs de cette première fondation lointaine, elle ne peut informer toutes les Sœurs d‘école dispersées dans les villages, et qui pourraient bien ne pas comprendre… Elle leur adresse une lettre tout imprégnée de son enthousiasme qu’elle voudrait contagieux.

Elle y traduit son émerveillement devant le choix de Dieu, son action de grâces, sa conscience de la grandeur et des exigences de ce choix, en même temps que sa foi en l’action prévenante de Dieu, seul Maître d’œuvre.

Que Dieu est bon de nous avoir choisies pour cette grande œuvre !

« …copies vivantes de la Maison de Nazareth. »

En 1817, lorsque Mère Marie-Joseph rédige les Constitutions à faire approuver par l’Église, elle introduit le « Plan de la Société » par un article-clé:  la Sainte Famille de Nazareth est sur terre comme une icône de la Trinité. Mère Marie-Joseph souhaite que les communautés soient des icônes de la Sainte Famille, des « copies vivantes », non pas simples photographies, mais animées de la même vie, du même amour, et donc portant les mêmes fruits pour le monde.

La petite Société consacrée à Dieu sous le nom et les auspices de la Sainte Famille se propose de travailler à glorifier l’adorable Trinité par son union avec Notre Seigneur, sa sainte Mère et Saint Joseph. C’est sur l’étude et l’imitation des vertus du Cœur de Jésus, notre divin Modèle, des saints Cœurs de Marie et de Joseph, si étroitement unis au Cœur adorable de notre Divin Sauveur, qu’elle doit se former, se soutenir et se perfectionner. Il faut donc, en conséquence, que le recueillement intérieur, un regard habituel de l’âme vers Notre Seigneur, une humilité profonde, l’obéissance la plus parfaite et une pauvreté rigoureuse soient les vertus favorites de celles qui la composent, afin que toutes les Maisons de la Société soient des copies vivantes de la Maison de Nazareth.

«… Ne comptant que sur Dieu. »

Le Plan de la Société qui introduit aux Constitutions de 1817, Mère Marie Joseph met l’accent sur un aspect qui lui paraît fondamental : la pauvreté. Pauvreté de la Société, pauvreté des personnes. Pauvreté qui n’est pas misère, mais choix de vivre dans la main de Dieu, de ne s’appuyer que sur lui, comme la Sainte Famille de Nazareth. Car Dieu « comble de biens les affamés » chantait Marie.

Lorsque, sur la route de Besançon à Amiens, en 1817, Mère Marie Joseph apprend que les ressources sur lesquelles elle compte lui feront défaut, elle reçoit cette nouvelle comme une grâce :

Mon Père, vous le savez, nous n’avons pas eu recours aux moyens humains pour nous établir à Besançon. Dieu nous a bénies. C’est Lui encore qui nous a aidées à préparer cette œuvre nouvelle: Il ne nous abandonnera pas. J’en ai la confiance : si les secours de la terre nous font défaut, nous aurons ceux du ciel. Mes Sœurs, dès aujourd’hui, commençons une neuvaine de prières pour remercier le Bon Dieu de ce qu’il nous met dans le cas de ne compter que sur Lui. 

« Une Fille de la Sainte-Famille doit aimer la pauvreté »

et faire paraître dans toute sa conduite qu’elle aime cette vertu. (…) S’unissant aux dispositions du Cœur de Jésus qui a tant aimé la pauvreté, elle se contentera pour les choses de la vie du pur nécessaire (…)

Elle imitera Jésus, Marie et Joseph qui vivaient pauvrement et du produit de leur travail. Servir Jésus-Christ dans la personne des enfants…

Fixer les yeux sur Jésus Sauveur, c’est participer au regard de Jésus sur le monde à sauver : sur les enfants, sur leurs familles. C’est porter sur eux le regard du Bon Pasteur, un regard plein de respect, de bonté, de douceur. Quelles que soient leurs limites, ils sont à ce titre « dignes de respect et d’amour ».

La Sœur méditera souvent ces paroles de Jésus-Christ :

Tout ce que vous ferez en mon Nom à l’un de ces petits, je le tiendrai fait à moi-même.

Pénétrée du sens de ces divines paroles, elle s’appliquera à servir Notre Seigneur dans la personne des enfants qui lui seront confiés, les respectant et les traitant avec beaucoup de charité, comme des âmes créées à l’image de Dieu et rachetées du précieux sang de Jésus-Christ ; toujours dignes, sous ce point de vue, de ses sollicitudes et de ses prières continuelles. Elle doit avoir à leur égard des manières pleines de bonté, de douceur et n’user de sévérité qu’après avoir employé les premiers moyens : bien persuadée que souvent la sévérité irrite les esprits et que la douceur a de puissants attraits pour gagner les cœurs.